La période séparant la constitution de la société, par la signature des statuts, de son immatriculation au registre du commerce et des sociétés, peut être mise à profit pour accomplir certains actes au nom et pour le compte de la société en formation. Qu’en est-il si ces actes sont ultérieurement contestés ? Dans un arrêt du 27 novembre 2024 (Com. 27-11-2024 n° 23-21.822), la Cour de cassation juge que les actions en nullité de tels actes sont soumises à la prescription triennale prévue par le droit des sociétés, et non à la prescription quinquennale de droit commun, dès lors qu’ils ont été accomplis après la constitution de la société, peu important la date de son immatriculation.
En l’espèce, une société de participation financière de profession libérale (SPFPL) avait souscrit au capital d’une société d’exercice libéral (SEL) alors qu’elle n’était pas encore immatriculée au registre du commerce et des sociétés. Plus de trois ans après cette souscription, la SEL avait agi en nullité de l’acte.
Pour tenter d’échapper à la prescription triennale applicable aux actions en nullité d’un acte de société (C. civ. art. 1844-14 et C. com. art. L 235-9, al. 1), la SEL soutenait que cette prescription ne concernait que les actes émanant d’une société immatriculée, dotée de la personnalité morale. Selon elle, l’acte litigieux ayant été conclu par le gérant de la SPFPL en sa qualité de représentant légal avant l’immatriculation, il ne s’agissait pas d’un acte de la SPFPL stricto sensu, celle-ci n’ayant alors pas d’existence juridique. Dès lors, seule la prescription quinquennale de droit commun était applicable (C. civ. art. 2224).
C’est cette argumentation qu’écarte la Cour de cassation en affirmant que la prescription triennale s’applique aux actions en nullité des actes accomplis après la constitution de la société, indépendamment de la date de son immatriculation au registre du commerce et des sociétés.
Que faut-il retenir ?
Quel est le délai de prescription applicable aux actions en nullité des actes accomplis par une société après sa constitution mais avant son immatriculation ?
Ces actions sont soumises à la prescription triennale prévue par le droit des sociétés (C. civ. art. 1844-14 et C. com. art. L. 235-9), et non à la prescription quinquennale de droit commun, dès lors que les actes contestés sont bien postérieurs à la constitution de la société, c’est-à-dire à la signature des statuts, peu important la date de son immatriculation.
La solution serait-elle différente si l’acte avait été accompli avant la constitution de la société ?
Oui, car les textes ne visent que les actes “postérieurs à la constitution” de la société. Un acte conclu avant même la signature des statuts relèverait donc du droit commun de la prescription, la société n’existant alors pas encore, même entre les associés.
Quelles sont les conséquences pratiques de cette décision ?
Cet arrêt simplifie et sécurise le régime des actes accomplis pour le compte de la société en formation, en les soumettant au même délai de prescription abrégé que ceux de la société immatriculée. Il dispense les praticiens d’avoir à distinguer selon la date d’immatriculation pour déterminer le délai de prescription applicable, tout en préservant la possibilité de contester utilement ces actes dans un délai raisonnable de trois ans.
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