Bail rural « dérogatoire » : a quelle date s’apprécie la consistance et l’importance de la parcelle litigieuse ?

En matière de droit rural, le bail dérogatoire occupe une place particulière. Ce type de bail, qui est un contrat de location qui s’écarte des conditions standard du statut du fermage, est souvent utilisé pour des petites parcelles de terre. Le statut du fermage est un ensemble de règles régissant les baux ruraux en France, définies dans le code rural et de la pêche maritime. Cet article vise à éclaircir les conditions d’application de ce bail spécifique, en s’appuyant sur un récent arrêt de la Cour de cassation (Cass. civ. 3, 29 février 2024, n° 22-17.641). Nous aborderons les critères déterminants la nature et la superficie des parcelles concernées, ainsi que les implications pratiques de ces règles pour les bailleurs et preneurs agricoles.

Le bail dérogatoire trouve sa justification dans l’article L. 411-3 du Code rural et de la pêche maritime, permettant de s’affranchir de certaines dispositions du statut du fermage sous conditions spécifiques.

L’article dispose : « Après avis de la commission consultative des baux ruraux, des arrêtés de l’autorité administrative fixent, en tenant compte des besoins locaux ou régionaux, la nature et la superficie maximum des parcelles de terres ne constituant pas un corps de ferme ou des parties essentielles d’une exploitation agricole pour lesquelles une dérogation peut être accordée aux dispositions des articles L. 411-4 à L. 411-7L. 411-8 (alinéa 1), L. 411-11 à L. 411-16 et L. 417-3. La nature et la superficie maximum des parcelles à retenir lors de chaque renouvellement de la location sont celles mentionnées dans l’arrêté en vigueur à cette date. La dérogation prévue au premier alinéa ne s’applique pas aux parcelles ayant fait l’objet d’une division depuis moins de neuf ans. Lorsqu’il n’est pas constaté par écrit, le bail des parcelles répondant aux conditions du premier alinéa est soumis aux dispositions de l’article 1774 du code civil. »

La Cour de cassation rappelle deux principes fondamentaux :

  • Moment de l’Évaluation : C’est à la date de conclusion du bail que doit être évalué si les parcelles en question constituent une partie essentielle d’une exploitation agricole, une entreprise dédiée à la production agricole, qui peut inclure des terres, des bâtiments, des machines, des animaux et des cultures.
  • Critère d’Importance : L’importance des parcelles doit être examinée par rapport à l’ensemble des terres exploitées par le preneur.

Ces principes ont été réaffirmés à la suite d’une affaire où une cour d’appel avait jugé qu’une parcelle de vigne constituait une partie essentielle de l’exploitation du preneur en raison du chiffre d’affaires réalisé sur ladite parcelle. La Cour de cassation a censuré ce raisonnement, rappelant que c’est à la date de conclusion du bail dérogatoire qu’il convient de se placer pour déterminer si la parcelle litigieuse constituait, à cette date, une partie essentielle de l’exploitation du preneur.

Que faut-il retenir ?

  • Quelles sont les conditions d’application du bail dérogatoire ? Le bail dérogatoire s’applique aux petites parcelles ne constituant pas un corps de ferme ou une partie essentielle d’une exploitation agricole, avec une superficie maximale définie par arrêté.
  • Comment évaluer l’importance des parcelles ? L’évaluation doit se faire à la date de conclusion du bail et par rapport à l’ensemble des parcelles exploitées par le preneur.
  • Quelle est la portée de l’arrêt de la Cour de cassation du 29 février 2024 ? Cet arrêt réaffirme la nécessité de se placer à la date de conclusion du bail dérogatoire pour déterminer si la parcelle litigieuse constituait, à cette date, une partie essentielle de l’exploitation du preneur.

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