Cession du contrôle d’une société : la solidarité entre cédants et acquéreurs

La cession du contrôle d’une société commerciale est un acte qui entraîne des conséquences juridiques importantes, notamment en matière de garantie de passif et de paiement du prix. La Cour de cassation, dans un arrêt du 24 janvier 2024 (Com. 24-1-2024 n° 20-13.755), rappelle que la solidarité entre les cédants et les acquéreurs n’est pas automatique.

Qu’est-ce que la cession du contrôle d’une société ?

La cession du contrôle d’une société est l’opération par laquelle un ou plusieurs associés cèdent la majorité des droits sociaux à un ou plusieurs acquéreurs, entraînant ainsi un changement dans la direction de la société. Le contrôle d’une société s’apprécie en fonction du nombre de voix dont disposent les associés dans les assemblées générales, ou du pouvoir de nomination des organes sociaux.

La cession du contrôle d’une société commerciale est considérée comme un acte de commerce, même si les parties n’ont pas la qualité de commerçant. Elle est soumise aux règles du droit commercial, notamment en ce qui concerne la solidarité entre débiteurs.

Qu’est-ce que la solidarité entre débiteurs ?

La solidarité entre débiteurs est le mécanisme qui permet au créancier d’une obligation de demander le paiement de la totalité de sa créance à l’un quelconque des débiteurs, sans avoir à respecter une répartition proportionnelle. Le débiteur qui a payé la totalité de la dette peut ensuite se retourner contre les autres débiteurs pour obtenir leur contribution.

En matière civile, la solidarité entre débiteurs ne se présume pas et doit être établie par une clause expresse ou par la loi. En matière commerciale, en revanche, la solidarité entre débiteurs est présumée et ne peut être écartée que par une clause contraire.

La solidarité entre débiteurs s’applique notamment aux obligations qui découlent de la cession du contrôle d’une société commerciale, telles que la garantie de passif ou le paiement du prix.

Qu’est-ce que la garantie de passif ?

La garantie de passif est la clause par laquelle le cédant s’engage à indemniser l’acquéreur en cas de survenance d’un passif antérieur à la cession, qui n’était pas connu ou révélé au moment de la cession. La garantie de passif vise à protéger l’acquéreur contre les risques liés à la situation financière, comptable, fiscale ou sociale de la société cédée.

La garantie de passif est généralement mise en œuvre par l’acquéreur qui constate l’existence d’un passif postérieurement à la cession, et qui en demande le remboursement au cédant. Si plusieurs cédants ont participé à la cession du contrôle d’une société, ils sont solidairement tenus de l’exécution de la garantie de passif à l’égard de l’acquéreur, sauf clause contraire.

Qu’est-ce que le paiement du prix ?

Le paiement du prix est l’obligation qui incombe à l’acquéreur de verser au cédant la somme convenue en contrepartie de la cession des droits sociaux. Le paiement du prix peut être effectué immédiatement au moment de la cession, ou être différé ou échelonné selon les modalités prévues par les parties.

Le paiement du prix peut être subordonné à la réalisation de certaines conditions, telles que l’approbation de la cession par les organes sociaux, l’obtention d’autorisations administratives, ou la vérification de la situation de la société cédée. Le paiement du prix peut également être révisé en fonction de l’évolution de certains paramètres, tels que le chiffre d’affaires, le résultat ou la valeur de la société cédée.

Si plusieurs acquéreurs ont participé à la cession du contrôle d’une société, ils sont solidairement tenus du paiement du prix à l’égard du cédant, sauf clause contraire.

Quel est l’apport de l’arrêt du 24 janvier 2024 ?

L’arrêt du 24 janvier 2024 de la Cour de cassation illustre les limites de la présomption de solidarité entre débiteurs en matière commerciale. Il rappelle que la solidarité ne s’étend pas aux créanciers qui n’ont pas contracté avec tous les débiteurs, ni aux débiteurs qui n’ont pas contracté avec tous les créanciers.

En l’espèce, quatre associés d’une société ont cédé le contrôle de celle-ci à deux acquéreurs, par des actes séparés signés le même jour. Chaque acte de cession comportait une garantie de passif, qui a été mise en œuvre par les acquéreurs. La cour d’appel a condamné solidairement les cédants à verser la somme due au titre de la garantie aux deux acquéreurs « pris ensemble », à charge pour ces derniers de se répartir les fonds au prorata des parts acquises.

La Cour de cassation a censuré cette décision, en considérant que le second acquéreur, qui n’avait acquis des parts sociales que du quatrième associé, ne pouvait pas bénéficier de la solidarité dont disposait le premier acquéreur envers tous les cédants. En effet, la solidarité entre créanciers, dite « active », n’est pas présumée et doit être expressément stipulée.

Que faut-il retenir ?

  • La cession du contrôle d’une société commerciale est un acte de commerce qui entraîne des obligations pour les cédants et les acquéreurs, notamment en matière de garantie de passif et de paiement du prix.
  • La solidarité entre débiteurs est présumée en matière commerciale et permet au créancier d’exiger le paiement de la totalité de sa créance à l’un quelconque des débiteurs.
  • La solidarité entre créanciers n’est pas présumée et doit être expressément stipulée pour permettre à chacun des créanciers d’exiger le paiement de la totalité de la créance au débiteur.
  • La solidarité entre cédants et acquéreurs ne s’étend pas aux parties qui n’ont pas contracté entre elles, sauf clause contraire.

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