Contestation de créances du mandataire : la demande de justificatifs ne vaut pas contestation

La procédure de vérification des créances déclarées dans le cadre d’une procédure collective est régie par les articles L. 622-21 et suivants du Code de commerce. Elle a pour objet de permettre au mandataire judiciaire de dresser la liste des créances admises au passif du débiteur et de proposer au juge-commissaire de statuer sur celles qui font l’objet d’une contestation. La contestation peut émaner du débiteur, du mandataire judiciaire ou d’un créancier. Elle doit être notifiée au créancier concerné par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Le créancier dispose alors d’un délai de trente jours pour répondre à la contestation. S’il ne le fait pas, il perd le droit de faire appel de l’ordonnance du juge-commissaire qui statue sur la créance. Cette sanction est prévue par les articles L. 622-27, L. 624-3, alinéa 2, et R. 624-1, alinéas 2 et 3 du Code de commerce, rendus applicables au redressement judiciaire par les articles L. 631-14, L. 631-18 et R. 631-29 du même code.

Mais qu’entend-on par contestation de la créance ? Quelle est la forme et le contenu de la lettre du mandataire judiciaire qui vaut contestation ?

C’est à ces questions que la Cour de cassation a répondu dans un arrêt du 13 septembre 2023 (Cass. com., 13 septembre 2023, n° 22-15.296, F-B).

Dans cette affaire, une société avait été mise en redressement judiciaire et un plan de redressement avait été arrêté. Le débiteur avait porté à la connaissance du mandataire judiciaire une créance chirographaire d’EDF. Le juge-commissaire avait rejeté la créance au motif que le mandataire judiciaire avait adressé au créancier une lettre de contestation de la créance et que ce dernier n’avait pas répondu dans le délai de trente jours. EDF avait interjeté appel de l’ordonnance du juge-commissaire, mais la cour d’appel avait déclaré son appel irrecevable pour le même motif.

La Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel en rappelant que la disposition privant une partie d’une voie de recours doit être interprétée strictement. Elle a jugé que la lettre du mandataire judiciaire se bornant à demander au créancier des pièces justificatives de la créance en précisant qu’à défaut, il envisageait de proposer au juge-commissaire le rejet de cette créance, n’était pas une lettre de contestation de l’existence, de la nature ou du montant de la créance. Par conséquent, le défaut de réponse du créancier dans le délai de trente jours ne le privait pas du droit de faire appel de l’ordonnance du juge-commissaire ayant rejeté sa créance.

Cette solution s’inscrit dans la jurisprudence traditionnelle de la Cour de cassation, qui a déjà énoncé que la lettre se bornant à demander au créancier de joindre à sa déclaration des documents justificatifs sans lui faire connaître si la créance était discutée et, dans l’affirmative, sur quoi portait la discussion ne vaut pas contestation (Cass. com., 14 mai 1996, n° 94-15.314). De même, la lettre par laquelle un mandataire judiciaire invite un organisme de Sécurité sociale à produire le titre exécutoire constatant sa créance et lui précisant qu’à défaut, il proposera son rejet, n’est pas une lettre de contestation au sens de l’article L. 622-27 du Code de commerce (Cass. com., 31 janvier 2017, n° 15-17.296, F-P+B+I).

Il ressort donc de ces arrêts que la lettre de contestation doit comporter des éléments précis et circonstanciés sur les motifs de la contestation, et non pas de simples demandes de renseignements ou de justifications. Il s’agit d’une garantie pour le créancier, qui doit être informé clairement des raisons pour lesquelles sa créance est mise en cause et des conséquences de son silence. Il s’agit aussi d’une garantie pour le juge-commissaire, qui doit pouvoir apprécier le bien-fondé de la contestation et trancher le litige.

 

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