Déclaration de créance inexacte du débiteur : relevé de forclusion ouvert au créancier

Le traitement réservé aux créanciers dans le cadre d’une procédure collective, (sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire), obéit à des règles strictes, dont le non-respect est sévèrement sanctionné (notamment l’inopposabilité de la créance à la procédure). En matière de déclaration de créance, l’on sait que le créancier dispose d’un délai de deux mois pour déclarer sa créance au mandataire judiciaire à compter de la publication au BODACC de la décision prononçant l’ouverture d’une procédure collective à l’encontre d’un débiteur. Si, depuis 2014, cette déclaration de créance est « déléguée » au débiteur, qu’en est-il lorsque ce dernier (i) ne porte pas à la connaissance du mandataire judiciaire l’existence d’une créance de l’un de ses créanciers ou (ii) qu’il porte à sa connaissance une créance dont le montant serait inexact ? ; Le créancier dispose-t-il d’un recours ? 

C’est à cette question que répond la Cour de cassation dans un arrêt en date du 27 mars 2024 (Com. 27 mars 2024, n°22-21016).

Rappel du contexte :

Depuis la loi du 25 janvier 1985, le législateur français a progressivement introduit et affiné des mécanismes permettant aux créanciers omis de se voir accorder une seconde chance pour déclarer leurs créances : le relevé de forclusion. La loi de sauvegarde des entreprises de 2005 a marqué un tournant en offrant aux créanciers la possibilité de se prévaloir d’une omission dans l’établissement de la liste des créanciers due par le débiteur, même si cette omission n’était pas volontaire, simplifiant ainsi les démarches pour les créanciers lésés.

L’ordonnance du 12 mars 2014 a ensuite consolidé cette évolution en introduisant la présomption de déclaration de créance par le débiteur pour le compte du créancier, lorsque celui-ci porte à la connaissance du mandataire judiciaire une créance, même si elle est omise de la liste initiale. Cela signifie que le créancier peut être considéré comme ayant déclaré sa créance si le débiteur en a informé le mandataire judiciaire, réduisant ainsi le risque de forclusion pure et simple.

La décision de la cour de cassation et son apport :

Dans cette affaire, un débiteur avait porté à la connaissance du mandataire judiciaire la créance de l’un de ses créanciers, non pas immédiatement au moment de l’établissement de la liste de ses créanciers, mais ultérieurement, précision étant faite que l’information relative à l’existence de ladite créance a bien été réalisée dans le délai de deux mois ouverts pour procéder à la déclaration de créance. L’originalité de cette affaire était que le montant déclaré par le débiteur n’était pas exact, de sorte que se posait la question du recours ouvert au créancier pour « ajuster » le montant déclaré par le débiteur.

Considérant avoir été « privé » du bon montant de sa créance en raison de la défaillance du débiteur, le créancier saisissait le juge commissaire d’un relevé de forclusion pour le delta inexact. Ce raisonnement est validé par la cour de cassation qui juge que « le créancier, s’il estime que la créance portée à la connaissance du mandataire judiciaire par le débiteur l’a été pour un montant inférieur à la créance qu’il soutient détenir, peut demander à être relevé de la forclusion pour déclarer le montant supplémentaire qu’il prétend lui être dû, à la condition d’établir que sa défaillance n’est pas due à son fait ».

L’arrêt est cependant censuré, non pas pour avoir statué différemment, mais tout simplement en raison de « l’automaticité » du relevé de forclusion jugé par la cour d’appel en pareille circonstance et alors qu’il revenait au créancier -même dans cette hypothèse- de rapporter la preuve que la forclusion n’était pas due à son fait.  

Que faut-il retenir ? :

Quel est le délai pour un créancier de déclarer sa créance dans une procédure collective ?

Le créancier dispose d’un délai de deux mois pour déclarer sa créance auprès du mandataire judiciaire, ce délai commençant à courir à partir de la publication de la décision d’ouverture de la procédure collective dans le Bulletin Officiel des Annonces Civiles et Commerciales (BODACC).

Quel recours est disponible pour un créancier si le montant déclaré de la créance est inexact ?

Le créancier peut demander un relevé de forclusion pour le montant supplémentaire qu’il prétend lui être dû, à condition de prouver que cette défaillance n’est pas de son fait. Cela lui permet de corriger le montant sans être pénalisé pour une erreur non volontaire du débiteur.

Quelle était la particularité de l’arrêt de la Cour de cassation du 27 mars 2024 ?

 L’arrêt a validé le principe que le créancier peut ajuster le montant déclaré lorsque le débiteur déclare un montant inexact, mais il a été censuré pour avoir traité l’acceptation du relevé de forclusion comme automatique. La Cour a rappelé que le créancier doit toujours prouver que l’omission n’était pas de son fait.

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