En matière de baux commerciaux, les parties peuvent prévoir une clause d’indexation du loyer, permettant de faire évoluer celui-ci en fonction d’un indice de référence. Cependant, cette clause, pour être licite, doit s’appliquer tant à la hausse qu’à la baisse, une stipulation en sens contraire (uniquement à la hausse) étant réputée non écrite. Se pose alors la question de l’étendue de cette sanction : seule la stipulation prohibée doit-elle être écartée ou la clause d’indexation doit-elle être réputée non écrite en son entier ? L’arrêt rendu par la Cour de cassation (Civ. 3ème, 4 juillet 2024, n°23-13.285) vient rappeler sa jurisprudence constante sur ce point : sauf indivisibilité, seule la stipulation litigieuse est écartée, la clause d’indexation subsistant pour le reste.
Dans l’affaire en question, un bail commercial avait été conclu le 1er juillet 2010, avant d’être cédé le 9 août 2012. Ce bail comportait une clause d’indexation dont le dernier paragraphe stipulait : « De convention expresse, la variation de l’indice ne pourra jamais avoir pour effet de diminuer le montant du loyer annuel tel qu’il aura été fixé lors du dernier réajustement en application de la présente indexation ».
Le locataire a assigné le bailleur initial et le nouveau en constatation du caractère non écrit de la clause d’indexation et en restitution des sommes payées au titre de celle-ci. La cour d’appel a réputé non écrite la clause d’indexation dans son entier, décision critiquée par les bailleurs dans leur pourvoi.
La Cour de cassation, au visa des articles L. 145-15 et L. 145-38 du code de commerce, rappelle qu’est réputée non écrite toute clause d’indexation du loyer ne jouant qu’en cas de variation à la hausse de l’indice de référence mais que seule la stipulation prohibée doit être réputée non écrite et non la clause en son entier, sauf cas d’indivisibilité.
Or, pour réputer la clause d’indexation non écrite en son entier, la cour d’appel avait retenu que la question n’était pas celle de la divisibilité, mais celle de son caractère essentiel et déterminant, l’intention du bailleur étant d’en faire une condition essentielle et déterminante de son consentement.
La Cour de cassation censure cette analyse : seule la stipulation prohibée doit être réputée non écrite lorsqu’elle peut être retranchée de la clause d’indexation sans porter atteinte à la cohérence de celle-ci. Le motif tiré de l’intention du bailleur est impropre à caractériser l’indivisibilité.
Cette solution n’est pas nouvelle. La Cour de cassation l’a déjà énoncée à plusieurs reprises : une clause d’indexation ne peut être réputée non écrite en son entier au seul motif que l’intention du bailleur était d’en faire, sans distinction entre ses différentes parties, une condition essentielle et déterminante de son consentement (Cass. civ. 3, 12 janvier 2022, n° 21-11.169 ; Cass. civ. 3, 28 septembre 2022, n° 21-25.507 ; Cass. civ. 3, 23 novembre 2022, n° 21-18.921).
L’indivisibilité, qui seule permettrait d’écarter la clause d’indexation en son entier, ne peut donc résulter de la seule volonté du bailleur. Elle doit s’apprécier objectivement, au regard de la cohérence de la clause : si la stipulation litigieuse peut être supprimée sans porter atteinte à cette cohérence, elle n’est pas indivisible du reste de la clause.
Que faut-il retenir ?
Quelle est l’étendue de cette sanction ? Toute la clause d’indexation est-elle écartée ?
Non, sauf cas d’indivisibilité, seule la stipulation prohibée (celle excluant la variation à la baisse) doit être réputée non écrite, le reste de la clause d’indexation demeurant valable.
Comment s’apprécie l’indivisibilité permettant d’écarter la clause d’indexation en son entier ?
L’indivisibilité ne peut résulter de la seule intention du bailleur de faire de la clause, sans distinction entre ses différentes parties, une condition essentielle et déterminante de son consentement. Elle doit s’apprécier objectivement : si la stipulation litigieuse peut être supprimée sans porter atteinte à la cohérence de la clause, elle n’est pas indivisible.
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