Agrément de cession de parts sociales en SARL : maîtriser les délais pour éviter les pièges

Un de vos associés souhaite céder ses parts à un tiers que vous ne connaissez pas. Vous recevez la notification un vendredi soir, partez en congé, et découvrez trois mois plus tard que ce tiers est automatiquement devenu votre associé.

Les enjeux sont considérables pour votre entreprise : un agrément accordé par défaut peut transformer radicalement l’équilibre de votre société. Le nouveau cessionnaire acquiert tous les droits d’un associé (droit de vote, droit aux bénéfices, droit de contrôle) sans que vous ayez pu évaluer sa compatibilité avec votre projet d’entreprise.

L’arrêt de la chambre commerciale du 2 avril 2025 (Com. 2 avril 2025, n° 23-23.553) rappelle que les délais pour statuer sur une demande d’agrément sont impératifs.

Quel est exactement le délai légal pour statuer sur un agrément ?

Le principe est clair mais souvent mal appliqué : vous disposez de 3 mois maximum à compter de la dernière notification pour faire connaître votre décision d’agrément (article L. 223-14 du Code de commerce).

Ce délai court de manière automatique et implacable. La Cour de cassation rappelle que ces dispositions sont d’ordre public, c’est-à-dire qu’elles s’imposent impérativement et ne peuvent faire l’objet d’aucun aménagement contractuel.

Exemple concret : Si la notification du projet de cession est effectuée le 15 janvier 2025 auprès du dernier associé, vous devez statuer au plus tard le 15 avril 2025. Passé cette date, l’agrément est automatiquement acquis au cessionnaire.

La jurisprudence précise un point crucial : ce délai de 3 mois constitue un délai-couperet. Aucune circonstance, même les contraintes procédurales internes, ne peut le prolonger.

Ce qu’il faut retenir:

Le délai de 3 mois pour statuer sur l’agrément est un délai maximum absolu, d’ordre public, qui ne peut être prolongé pour aucun motif, même procédural.

Comment organiser une consultation écrite sans dépasser le délai ?

L’arrêt du 2 avril 2025 tranche une réelle difficulté : le délai de trois mois laissé aux associés pour statuer sur l’agrément ne peut être prorogé par une consultation des associés qui seraient adressées avant l’écoulement du délai mais dont le résultat serait connu après le délai. Trois mois, et rien de plus.

Concrètement, si vous organisez une consultation écrite, vous devez impérativement :

  1. Calculer à rebours : partez de la date limite (3 mois après notification) et retirez les 15 jours minimum
  2. Envoyer la consultation au plus tard 2 mois et 15 jours après la notification initiale
  3. Prévoir une marge de sécurité pour les aléas postaux ou les retards de réponse

Exemple pratique : Pour une notification effectuée le 1er février, vous devez absolument envoyer votre consultation écrite avant le 16 avril pour recueillir les réponses avant le 1er mai (date limite).

La solution s’applique également aux assemblées générales : l’obligation de convoquer les associés 15 jours avant la réunion ne prolonge pas le délai de 3 mois.

Ce qu’il faut retenir:

Il appartient au gérant d’organiser la consultation (écrite ou en assemblée) suffisamment tôt pour respecter à la fois le délai de 15 jours et la limite de 3 mois.

Que se passe-t-il en cas de dépassement du délai ?

Les conséquences d’un dépassement sont lourdes et irréversibles : l’agrément est automatiquement acquis au cessionnaire. Aucune excuse ne sera admise, même si le retard résulte d’une bonne foi ou d’une méconnaissance des règles.

Le cessionnaire peut alors légitimement :

  • Exiger la reconnaissance de sa qualité d’associé
  • Demander la mise à jour des registres sociaux
  • Exercer immédiatement tous ses droits d’associé (vote, dividendes, information)
  • Obtenir en justice la condamnation de la société récalcitrante

Cas concret tiré de la jurisprudence : Dans l’affaire jugée, la société a tenté d’invoquer le délai de consultation écrite pour justifier son retard. Non seulement cet argument a été rejeté, mais elle a dû reconnaître la qualité d’associé au tiers et autoriser la cession.

Les associés se retrouvent ainsi contraints d’accepter un partenaire qu’ils ont pourtant refusé, simplement pour un problème de calendrier.

Ce qu’il faut retenir:

Un dépassement même d’un jour du délai de 3 mois entraîne l’agrément automatique et définitif du cessionnaire, sans possibilité de recours.

Quels risques pour votre société en cas d’agrément automatique ?

L’entrée forcée d’un associé non désiré peut déstabiliser durablement votre entreprise :

Risques stratégiques :

  • Modification des équilibres de pouvoir au sein de la société
  • Blocage potentiel des décisions importantes nécessitant une majorité qualifiée
  • Conflits d’intérêts si le nouveau cessionnaire est un concurrent

Risques financiers :

  • Droit aux dividendes dès son entrée au capital
  • Possible demande de rachat de ses parts à un prix majoré en cas de conflit
  • Coûts de procédures judiciaires pour régulariser la situation

Risques opérationnels :

  • Droit d’information étendu sur la gestion et les comptes
  • Capacité d’opposition aux décisions du gérant
  • Risque de révocation du gérant si le nouveau cessionnaire s’allie à d’autres associés mécontents

FAQ – Ce qu’il faut retenir

 

Le délai de 3 mois peut-il être augmenté par les statuts ?

Non, il s’agit d’un délai maximum d’ordre public.

Que faire si un associé ne répond pas à la consultation écrite ?

Son silence ne vaut ni acceptation ni refus. La décision se prend à la majorité des associés ayant effectivement répondu.

L’agrément automatique peut-il être contesté après coup ?

Non, l’agrément acquis par écoulement du délai est définitif et ne peut plus être remis en cause.

Notre cabinet dédié au droit des sociétés peut vous conseiller utilement.

N’hésitez pas à prendre rendez-vous 

Avocats Montpellier

Avocats d'affaires et droit des sociétés
Qui sommes-nous ?

Le cabinet de Maître Guillaume Lasmoles est un cabinet d'avocats spécialisé en droit des affaires. Il accompagne les entreprises, les dirigeants et les particuliers dans leurs projets et leurs litiges. Il dispose d'une équipe d'avocats expérimentés et réactifs, qui proposent des solutions personnalisées et adaptées aux besoins de leurs clients.

Pourquoi faire appel à un avocat ?

Le rôle de l’avocat, et plus spécialement, de l’avocat en droit des affaires et des sociétés est de conseiller, de prévenir son client tant en ce qui concerne l’intérêt de l’opération projetée, que son coût ou encore sa pertinence.