La validité des cessions de parts sociales en l'absence d'écrit : l'échange des consentements suffit

La cession de parts sociales est une opération courante dans la vie des sociétés, permettant aux associés de transférer tout ou partie de leurs droits. Si l’article 1865 du code civil prévoit que cette cession doit être constatée par écrit, la portée de cette exigence mérite d’être précisée. S’agit-il d’une condition de validité de la cession ou d’une simple condition d’opposabilité aux tiers ? L’arrêt rendu par la Cour de cassation (Civ. 3ème 4 juillet 2024, n° 23-10.534) vient rappeler que l’écrit n’est pas requis à peine de nullité : la cession est valablement formée dès l’échange des consentements entre les parties.

Dans l’affaire en question, trois associés avaient constitué en 2000 une société civile immobilière (SCI) pour acquérir un local commercial, l’un d’eux détenant 45 parts sur 100. En mars 2009, un acte enregistré et déposé au greffe du tribunal de commerce constatait la cession de la totalité des parts de la SCI, une part étant acquise par un nouvel associé et les autres par une seconde SCI.

En septembre 2010, la SCI cédée avait vendu son bien immobilier pour un million d’euros. Mais en 2014, l’un des associés cédants, soutenant n’avoir pas signé l’acte de cession de mars 2009, avait assigné les cessionnaires en indemnisation. La cour d’appel avait rejeté ses demandes, le jugeant engagé par l’acte de cession. L’associé s’était alors pourvu en cassation.

La Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle rappelle, comme l’avait fait la cour d’appel, que l’exigence d’un écrit constatant la cession de parts sociales, prévue à l’article 1865 du code civil, n’est pas une condition de validité de la cession. Celle-ci est valablement formée par le seul échange des consentements entre les parties.

Pour déterminer si, en l’espèce, cet échange des consentements avait bien eu lieu, la Cour se fonde sur une attestation du 5 octobre 2009, signée par le cédant, qui faisait expressément mention de la cession de ses parts et certifiait le rachat de son compte courant au sein de la société cédée. Cette attestation, dont la signature avait été certifiée par un fonctionnaire municipal en présence de l’intéressé muni d’une pièce d’identité, constituait un commencement de preuve par écrit susceptible de suppléer l’acte de cession lui-même.

La Cour relève par ailleurs que ce commencement de preuve était corroboré par le comportement du cédant, qui ne s’était pas étonné de n’avoir été convoqué à aucune assemblée générale et de n’avoir reçu aucun document relatif à la vie de la société de 2009 à 2014. La cour d’appel avait donc pu valablement en déduire qu’il savait avoir cédé ses parts depuis de nombreuses années.

Cette solution s’inscrit dans la lignée d’une jurisprudence constante de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, qui a déjà affirmé à plusieurs reprises que l’écrit n’est pas une condition de validité du contrat de cession de parts sociales, mais seulement une condition de son opposabilité aux tiers (Cass. com., 23 juin 1987, n° 85-17.748). Le contrat est parfait entre les parties dès l’échange de leurs consentements.

Que faut-il retenir ?

L’écrit est-il une condition de validité de la cession de parts sociales ?

Non, l’exigence d’un écrit prévue à l’article 1865 du code civil n’est pas une condition de validité de la cession, mais seulement une condition de son opposabilité aux tiers. La cession est valablement formée par le seul échange des consentements entre les parties.

En l’absence d’écrit, comment peut-on prouver la réalité de la cession ?

En l’absence d’acte formel, la réalité de la cession peut être prouvée par tout moyen, notamment par un commencement de preuve par écrit (tel qu’une attestation signée par le cédant mentionnant la cession) corroboré par des éléments extrinsèques (comme le comportement du cédant postérieurement à la cession alléguée).

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