Le contrat de bail commercial organise les relations entre un bailleur et un locataire pour la location d’un local à usage commercial. Au-delà de la mise à disposition des lieux loués en contrepartie d’un loyer, le bail commercial régit notamment la répartition entre les parties d’un certain nombre de charges, taxes et impôts liés au local.
Afin d’assurer une meilleure transparence et prévisibilité au profit du locataire, le législateur a instauré en 2014, avec la loi Pinel, l’obligation pour le bail commercial de comporter un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances liés au bail, avec indication de leur répartition entre bailleur et locataire (article L.145-40-2 du code de commerce). Toute clause ayant pour effet de faire échec à cette obligation est réputée non écrite.
Un récent arrêt de la Cour d’appel de Versailles (CA Versailles 7 mars 2024, n°22/05759) vient utilement préciser la portée de cette obligation et les conséquences d’un inventaire incomplet ou défaillant.
Dans cette affaire, un bailleur réclamait à son locataire le règlement de charges qu’il estimait lui être dues en vertu de diverses clauses du bail organisant selon lui la répartition des charges entre les parties.
La Cour d’appel a débouté le bailleur de sa demande au motif que le bail ne comportait pas d’inventaire des charges conforme aux exigences légales. En effet, la Cour a relevé que :
– Certaines clauses mettaient des obligations d’entretien à la charge du locataire, sans préciser les charges refacturables par le bailleur à ce titre ;
– D’autres clauses se contentaient de rappeler la répartition légale de certaines charges (grosses réparations à la charge du bailleur) ou les obligations générales du locataire (surveillance et entretien des locaux) ;
– Une clause spécifique prévoyait le remboursement par le locataire de certaines taxes (taxe foncière, taxe d’enlèvement des ordures ménagères…) mais contournait l’exigence d’inventaire.
Selon la Cour, l’inventaire prévu par la loi a un caractère exhaustif et limitatif. Il constitue le seul moyen pour le bailleur d’imputer des charges au locataire. Toute catégorie de charges qui n’y figure pas ne pourra pas être récupérée, quand bien même d’autres clauses du bail organiseraient une répartition. Celles-ci sont inopérantes et réputées non écrites si l’inventaire lui-même est lacunaire.
L’inventaire doit donc se suffire à lui-même et rassembler de manière complète et autonome l’intégralité des charges, taxes et impôts refacturables au locataire.
La Cour rappelle que cette exigence légale ne saurait être contournée ou satisfaite a minima par des clauses disparates organisant la répartition de certaines charges. L’inventaire est la pièce maîtresse et le passage obligé pour la détermination des charges locatives récupérables. Son exhaustivité conditionne la faculté même du bailleur d’en obtenir le remboursement.
En écartant les stipulations organisant la refacturation de charges non mentionnées à l’inventaire, les juges font une application stricte des textes. Ils invitent les rédacteurs de baux commerciaux à la plus grande rigueur dans l’élaboration de l’inventaire, sous peine de priver le bailleur de son droit à récupération des charges.
Que faut-il retenir ?
Quel est le fondement de l’obligation d’inventaire des charges dans les baux commerciaux ?
L’article L.145-40-2 du code de commerce impose que tout bail commercial comporte un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances liés au bail, avec indication de leur répartition entre bailleur et locataire.
Quelles sont les caractéristiques de l’inventaire des charges ?
L’inventaire doit être exhaustif et autonome. Il doit répertorier de façon complète l’intégralité des charges et taxes refacturables par le bailleur au locataire.
Quelles sont les conséquences d’un inventaire incomplet ou absent ?
Le bailleur ne pourra pas obtenir le remboursement des charges non répertoriées dans l’inventaire, même si d’autres clauses du bail les mettent à la charge du locataire. Ces clauses seront réputées non écrites comme contrevenant à l’article L.145-40-2 qui est d’ordre public.
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