La clause résolutoire d'un bail commercial peut être suspendue pour tout type de manquement du preneur

La clause résolutoire insérée dans un bail commercial permet au bailleu d’obtenir la résiliation de plein droit du contrat en cas de manquement du preneur à ses obligations. Pour tempérer les effets drastiques de ce mécanisme, l’article L. 145-41 du code de commerce permet au locataire, à son alinéa 2, de demander au juge la suspension des effets de la clause en lui accordant des délais de régularisation. La portée exacte de cette faculté était cependant discutée : ne concernait-elle que les manquements du preneur à ses obligations financières ou pouvait-elle jouer pour tout type d’infraction, y compris à une obligation de faire ? C’est à cette question que répond la Cour de cassation dans un arrêt du 6 février 2025 (Civ 3ème, 6 fév. 2025, n° 23-18.360), en affirmant sans ambiguïté que la suspension peut être demandée quel que soit le manquement reproché.

En l’espèce, un bailleur avait reproché à son locataire, exploitant un restaurant, d’avoir cessé son activité en violation d’une clause du bail l’obligeant à laisser les locaux constamment ouverts et exploités. Ce manquement étant visé par la clause résolutoire, le bailleur avait délivré un commandement d’avoir à régulariser sous peine de résiliation de plein droit.

Le preneur avait alors demandé au juge, sur le fondement de l’article L. 145-41 alinéa 2 du code de commerce, la suspension des effets de la clause en sollicitant des délais de régularisation. Mais la cour d’appel d’Aix-en-Provence avait rejeté cette demande, considérant que la faculté de suspension ne concernait que les manquements à une obligation de payer une somme d’argent, et non ceux à une obligation de faire comme en l’espèce.

C’est cette interprétation restrictive que censure la Cour de cassation, en affirmant au contraire que les dispositions de l’article L. 145-41 alinéa 2 s’appliquent à toutes les causes de résiliation de plein droit, y compris lorsqu’elles sont relatives à une obligation de faire.

Cette solution s’imposait tant au regard de la lettre que de l’esprit du texte.

D’une part, celui-ci vise de façon générale “les effets de la clause résolutoire”, sans distinguer selon la nature de l’obligation inexécutée. Dès lors que la stipulation permet la résiliation pour un manquement donné, le preneur doit pouvoir demander la suspension de ses effets. Peu importe que l’infraction concerne le paiement d’une somme ou l’exécution d’une prestation.

D’autre part, et surtout, la ratio legis de ce mécanisme est de protéger le locataire contre l’automaticité de la sanction attachée à la clause résolutoire, en lui permettant d’obtenir un répit pour se conformer à ses obligations. Cette finalité protectrice ne serait que très imparfaitement atteinte si la suspension était cantonnée aux seuls manquements financiers. Le preneur serait alors privé de ce filet de sécurité face à une résiliation de plein droit motivée par l’inexécution d’une obligation de faire, pourtant tout aussi préjudiciable.

Que faut-il retenir ?

La faculté pour le preneur de demander la suspension des effets de la clause résolutoire ne vaut-elle que pour ses manquements à une obligation financière ?

Non, la Cour de cassation affirme clairement que cette faculté joue pour tout type d’infraction visée par la clause résolutoire, y compris le manquement à une obligation de faire. Le domaine de la suspension n’est pas limité aux seules inexécutions d’obligations de payer une somme d’argent.

Sur quel fondement textuel la Cour de cassation assoit-elle cette solution ?

La Cour se fonde sur les dispositions de l’article L. 145-41 alinéa 2 du code de commerce, qui visent de façon générale “les effets de la clause résolutoire” sans distinguer selon la nature de l’obligation inexécutée. La référence faite par ce texte à l’article 1343-5 du code civil ne concerne que les modalités procédurales de la demande, et non son champ d’application matériel.

Quels sont les garde-fous encadrant la mise en œuvre de cette faculté de suspension ?

Si le juge dispose d’un pouvoir souverain pour accorder des délais au preneur, il doit respecter les limites de durée fixées à l’article 1343-5 du code civil. Et la Cour de cassation se montre très stricte sur le respect scrupuleux de ces délais une fois accordés, sanctionnant le moindre écart par le jeu de la clause résolutoire, indépendamment de la bonne ou mauvaise foi du bailleur.

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