Le droit de reprise dans le cadre d'un bail rural : conditions et appréciation souveraine des juges du fond

Le droit de reprise est une prérogative offerte au bailleur dans le cadre d’un bail rural, lui permettant de reprendre possession des biens loués au profit d’un descendant, sous certaines conditions. L’arrêt rendu par la Cour de cassation le 11 juillet 2024 (Civ. 3ème, 11 juillet 2024, n°23-11.418) apporte des précisions quant à l’une de ces conditions : la possession personnelle, par le bénéficiaire de la reprise, du matériel nécessaire à l’exploitation des parcelles reprises. Cette décision rappelle également le pouvoir souverain d’appréciation dont disposent les juges du fond pour vérifier si cette condition est remplie.

Dans l’affaire en question, un couple avait donné à bail à leur fille des parcelles de vigne pour une durée de dix-neuf années. Par la suite, les propriétaires ont donné à leurs deux enfants la nue-propriété de l’ensemble des vignes leur appartenant. Après plusieurs renouvellements tacites du bail, les bailleurs ont délivré un congé pour reprise au profit du fils de l’une des indivisaires, épouse du preneur à bail. Le preneur a alors saisi le tribunal paritaire des baux ruraux afin d’obtenir la nullité de ce congé, mais sa demande a été rejetée tant en première instance qu’en appel.

Le pourvoi formé par le preneur soulevait la question de savoir si la mise à disposition du matériel par un tiers permettait de caractériser la possession à titre personnel par l’intéressé, au sens de l’article L. 411-59 du code rural et de la pêche maritime, condition nécessaire à l’exercice du droit de reprise au profit d’un descendant du bailleur.

La Cour de cassation répond par l’affirmative, considérant que la mise à disposition du matériel par un tiers, aux termes d’une convention établie avec effet à la date d’effet du congé et pour une durée de neuf ans, permet au bénéficiaire de la reprise d’être en possession du matériel nécessaire pour exploiter les parcelles reprises.

Que faut-il retenir ?

Quelles sont les conditions requises pour l’exercice du droit de reprise dans le cadre d’un bail rural au profit d’un descendant du bailleur ?

Pour exercer le droit de reprise au profit d’un descendant, le bailleur doit notamment démontrer que le bénéficiaire de la reprise possède personnellement les matériels nécessaires à l’exploitation des parcelles reprises ou, à défaut, dispose des moyens pour les acquérir.

La mise à disposition du matériel par un tiers permet-elle de remplir la condition de possession personnelle du matériel nécessaire à l’exploitation ?

Oui, la Cour de cassation considère que la mise à disposition du matériel par un tiers, aux termes d’une convention établie avec effet à la date d’effet du congé et pour une durée suffisante, permet au bénéficiaire de la reprise d’être en possession du matériel nécessaire pour exploiter les parcelles reprises.

Quel est le rôle des juges du fond dans l’appréciation du respect de cette condition ?

Les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain d’appréciation pour vérifier si la condition de possession personnelle du matériel nécessaire à l’exploitation est remplie. Ils doivent constater l’existence d’éléments permettant de justifier cette possession, tels qu’une convention de mise à disposition du matériel, et apprécier si ces éléments sont suffisants au regard de la superficie des parcelles reprises.

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