Un bail rural est un contrat par lequel un propriétaire met à disposition d’un exploitant agricole des terres ou des bâtiments à usage agricole, en contrepartie d’un loyer ou d’un partage des récoltes. Lorsqu’un bien agricole est grevé d’un usufruit, l’usufruitier ne peut consentir seul un bail rural, le concours du nu-propriétaire étant nécessaire. A défaut, le bail encourt la nullité. Aux termes d’un arrêt en date du 11 juillet 2024, la Cour de cassation (Civ 3ème, n° 23-11.688) précise les conséquences de l’annulation d’un tel bail, notamment sur le droit du preneur à une indemnité au titre des améliorations apportées au fonds loué.
En l’espèce, un usufruitier avait consenti seul, sans le concours des nus-propriétaires, plusieurs baux ruraux à un exploitant agricole en 2009 et 2011. Après le décès de l’usufruitier en 2011, les nus-propriétaires ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux pour faire annuler ces baux.
Dans un premier temps, les juges du fond avaient considéré que l’usufruitier s’était comporté comme le propriétaire apparent des biens et que le preneur avait pu, de bonne foi, penser contracter avec le véritable propriétaire. Cependant, la Cour de cassation a cassé cette décision en 2020 (Civ. 3ème, 6 février 2020, n° 18-23.457), rappelant qu’en application des articles 544 et 595 du code civil, l’usufruitier ne peut conclure seul un bail rural.
La Cour d’appel de renvoi a ensuite confirmé la nullité des baux litigieux et fixé l’indemnité d’occupation due par le preneur depuis le décès de l’usufruitier en 2011 jusqu’à son départ. Avant dire droit sur l’indemnité potentiellement due au preneur sortant au titre des améliorations apportées au fonds (art. L.411-69 du code rural et de la pêche maritime), la Cour d’appel a ordonné une expertise judiciaire.
C’est ce dernier point que la Cour de cassation censure. Se fondant sur l’article 1304 du code civil (dans sa version antérieure à la réforme du droit des contrats de 2016), la Haute juridiction rappelle que la nullité d’un contrat emporte son effacement rétroactif et remet les parties dans leur situation initiale, comme si le contrat n’avait jamais existé. Or, le droit du preneur à une indemnité pour les améliorations apportées au fonds prévue par l’article L.411-69 du code rural suppose l’existence d’un bail rural valide prenant fin. Par conséquent, lorsque le bail est annulé et réputé n’avoir jamais existé, le preneur ne peut prétendre à cette indemnité. Il ne peut réclamer qu’une indemnité pour la remise en état.
Que faut-il retenir ?
Quelles sont les conséquences de l’annulation d’un bail rural conclu par un usufruitier sans le concours du nu-propriétaire ?
L’annulation du bail le fait disparaître rétroactivement. Le preneur ne peut donc pas prétendre à l’indemnité prévue à l’article L.411-69 du code rural pour les améliorations apportées au fonds loué. Il ne peut demander qu’une remise des lieux en l’état.
Que se passe-t-il pour la période précédant l’annulation du bail ?
Le preneur sera redevable d’une indemnité d’occupation depuis la fin du bail jusqu’à son départ effectif des lieux.
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